Une lettre que Voltaire adresse en 1736 à son ami Tiriot et dans laquelle il parle de sa chère Emilie avec une émotion toujours palpable.
“a m. Tiriot de m. de Voltaire
J’ay été malade. madame du châtelet l’est a son tour. je vous écris a la hate au chevet de son lit et je vous écris pour vous dire qu’on vous aime a cirey autant que chez Plutus pollion. puis vous saurez qu’alzire, la dédicace, le discours, la pièce corrigées jour et nuit viennent de partir par la poste. tout cela est changé comme une chrysalide qui vient de devenir papillon en une nuit, vous direz que je me pille car c’est ce que je viens d’écrire à m. Dargental mais quand Emilie est malade je n’ay point d’imagination. je viens d’avoir les feuillets de l’abbé prevost, je vous prie de l’assurer de mon amitié pour le reste de ma vie je luy écriray assurément.
comptez mon cher ami qu’il fallait une dedicace d’une honnête etendue j’ose assurer que c’est la première chose adroitte que j’ay faitte de ma vie. toutes les femmes qui se piquent de sciences et d’esprit seront pour nous. les autres s’intéresseront au moins a la gloire de leur sexe.
les académiciens des sciences seront flattez, les amateurs de l’antiquité retrouveront avec plaisir des traits de cicerons et de Lucrece. enfin morbleu Emilie ordonne obéissons.
Si la fin du discours que je vous adresse ne vous plait pas, je n’écris plus de ma vie. allons voyons si nous serons sur d’un censeur.
mon cher amy, je vous recommande cette affaire elle est sérieuse pour moy il s’agit d’Emilie et de nous.
Remerciez De marivaux il fait un gros livre contre moi qui lui vaudra cent pistoles. je fais la fortune de mes ennemis
a cirey ce 4 mars 1736
Dédicace spéciale à monsieur Chevreux