En lisant Dissertation sur la nature et la propagation du feu rédigée par Emilie du Châtelet et récompensée par l’académie de sciences en 1738, je m’aperçois du décalage abyssal entre nos connaissances actuelles de l’univers et le tout début de la physique expérimentale initiée par Newton…
Emilie réalise son essai en huit jours, ne dormant qu’une heure par nuit, et n’hésite pas à plonger un vers luisant dans l’eau glacée ou à regarder le monde à travers un trou d’épingle pour prouver que le feu n’est pas une matière…
Parmi ses conclusions, le soleil est une masse et le feu une énergie…
A propos de cet essai, Mme de Graffigny ne tarit pas d’éloges sur Emilie chez laquelle elle est invitée en décembre 1739. Elle écrit un hymne (à sa manière) pour célébrer son hôtesse :
« Ah, quelle femme ! que je suis petite ! Si ma diminution s’etendoit sur le corps, je passerois par le trou d’une cerure.
J’ai lu aussi le Discours sur le feu de Voltaire ; il n’est pas digne de torcher le cul de l’autre.
Il est bien vray que quand les femmes se mele d’ecrire, elles surpassent les hommes. Quelle prodigieuse difference !
Mais combien de siecles faut-il pour faire une femme comme celle-la ?
Et comment a-t-elle fait ce discour ? La nuit, parce qu’elle se cachoit de Voltaire. Elle ne dormoit qu’une heure ; accablée de someil, elle se mettoit les mains dans de l’eau a la glace, ce promenoit en se battant les bras, et puis ecrivoit les resonnemens les plus abstrait avec un stille a se faire lire pour lui.
Elle a passé huit nuit de suite de cette façon. »
(Petits Riens de Mme de Graffigny, Liralest 2021)