[Mémoire de la place Stanislas]
De 1945 à 1968, à la Taverne Alsacienne, 17 rue Héré, à Nancy, on pouvait croiser Robert Laverny (1892-1969).
Le poète était souvent dans une petite salle au fond de ce restaurant qui était en réalité son « asile ».
Après deux guerres mondiales et une vie ponctuée d’errance, ce « prince de la rue », tel qu’il se surnommait, avait été accueilli par M. et Mme Muller, aubergistes au grand cœur, lesquels, après l’avoir retrouvé un soir enroulé dans une couverture, l’avait installé dans une chambre qu’il gardera pendant 23 ans.
La taverne des Muller était connue pour être le rendez-vous des artistes et, en particulier, des artistes lyriques en tournée à Nancy.
Philippe Bruant raconte :
« Persécuté par un contrôleur des impôts qui le soupçonnait de cacher ses revenus, Laverny se rendit au bureau de tabac tenu par M. et Mme Bruant (les parents de Philippe Bruant), pour y acheter « à crédit » un énorme cigare Havane. Le poète, ainsi pourvu, souhaitait expliquer en détail à son persécuteur sa vie de bohème… L’agent des finances publiques, rapidement indisposé par les volutes que le poète dirigeait volontairement dans sa direction, dut écourter le rdv… »
« Mon âme flotte au vent gris-perle de Lorraine
Lequel, rageusement, persifle à Vaudémont
Et lamente en Sion.
Inespérée, une éclaircie ! Et, sur la plaine,
Trois fines lames d’or, du ciel venues,
Scintillantes saluent.
On voit l’avoir fuir, les peupliers frémir ;
Un hêtre pourpre orchestre la verdure…
Délicieux, un long soupir,
Comme d’amour, nous enveloppe ; hélas guère, il ne dure.
Car déjà, gris et noir, le ciel rallie
Notre mélancolie. »
Moi, prince de la rue, Nancy, 1937.
Robert Laverny.
Dédicace spéciale à Phiphi
Merci pour cette touche Gérard