Diderot exprime, dans une lettre à son amoureuse Sophie Volland, sa préoccupation d’une existence après la mort :
« Je me disais [Diderot]: Ceux qui se sont aimés pendant leur vie et qui se font inhumer l’un à côté de l’autre ne sont peut-être pas si fous qu’on pense.
Peut-être leurs cendres se pressent, se mêlent et s’unissent ! Que sais-je ?
Peut-être n’ont-elles pas perdu tout sentiment, ni toute mémoire de leur premier état.
Peut-être ont-elles un reste de chaleur et de vie dont elles jouissent à leur manière au fond de l’urne froide qui les renferme. Nous jugeons de la vie des éléments par la vie des masses grossières. On croit qu’il n’y a qu’un polype ?
Et pourquoi la nature entière ne serait-elle pas du même ordre ?
Lorsque le polype est divisé en cent mille parties, l’animal primitif et générateur n’est plus, mais tous ses principes sont vivants.
O ma Sophie ! il me resterait donc un espoir de vous toucher, de vous sentir, de vous aimer, de vous chercher, de m’unir, de me confondre avec vous quand nous ne serons plus, s’il y avait pour nos principes une loi d’affinité, s’il nous était réservé de composer un être commun, si je devais dans la suite des siècles refaire un tout avec vous, si les molécules de votre amant dissous avaient à s’agiter, à s’émouvoir et à rechercher les vôtres éparses dans la nature ! Laissez-moi cette chimère, elle m’est douce, elle m’assurerait l’éternité en vous et avec vous ».
Lettres à Sophie Volland, Diderot